Les êtres sont bidimentionnels lorsque l'on a 20 ans

Samedi dernier, dans l'émission "Le zapping de France Inter", Eric-Emmanuel Schmitt a sortie une de ces expression qui fait sens, en une phrase qui illustre toute une idée. Je la replace dans son propos, en réponse à la question, "c'est quoi la culture ?" :

La culture c'est la possibilité d'enrichir le présent en ayant accès au passé comme au présent. Les livres, ou les tableaux, ou les musiques, c'est ce qui nous apprend à ressentir, à ouvrir les yeux, à trouver que l'univers est plus complexe que l'on ne croit au départ.
[...]
Moi à 20 ans j'étais persuadé que j'avais fait le tour de tout, et maintenant à 47 je découvre enfin le monde, que les sentiments sont toujours plus paradoxaux et complexes que ce que je croix, que les êtres humains ont encore plus de profondeur, une profondeur en tout cas qui m'échappait totalement lorsque j'avais 20 ans. Ils étaient bidimentionnel à 20 ans pour moi les êtres. Et la culture, (...) c'est grâce à la lecture que j'ai découvert les arcanes du monde (...). On ne lit pas pour célébrer la culture, on lit pour vivre, on pense pour vivre.

C'est cette multidimentionnalité de la chose humaine qui en fait tout sont intérêt. Qui fait que l'on est agacé par cette culture de la simplification qui nous est imposée par les média mais aussi une certaine classe politique, qui se contente de petites phrases, de clichés. Une certaine classe politique qui ne daigne pas faire l'effort de la pédagogie, "vous comprenez, c'est trop compliqué pour les électeurs".

La complexité de la chose humaine est pour moi un moteur. Se promener dans la rue et regarder les passants, en les imaginant, ailleurs. Se dire qu'ils sont tous forts et faibles, tous avec un référentiel différent, des lunettes de la vie qui n'ont pas les mêmes focales. Une infinité de complexités. Chacun est un roman différent, avec des tranches de vie empilées en strates dont on ne devine que la dernière couche.

La multidimentionnalité de la chose humaine dans laquelle je me plonge avec l'engagement politique est une découverte permanente qui chamboule les idées reçues à chaque rencontre, un peu comme la découverte en mathématique des nombres imaginaires lorsque j'étais en terminale. Précautionneusement, le professeur nous introduisait ce petit "'i''" qui nous faisait passer des nombres linéaires (de - l'infini à + l'infini) aux nombres complexes, sur un plan. Le simple nombre 2, connu et archi connu depuis la maternelle et qui ne pouvait avoir qu'une seule valeur, 2, tout à coup, devenais à son tour une infinité de possibles. Ouahhh, ainsi donc l'on pouvait comprendre et résoudre des problèmes du monde réel avec des nombres multidimentionnels.

Prêter aux êtres une profondeur pas forcément visible. Les voir comme des équations dont toutes les variables peuvent être multidimentionnelles, des équations non résolvables en sommes, où au fur et à mesure que l'on essaie de les résoudre, les équations changent, nous contraignant à de perpétuelles approximations par simplification, forcément fausse... en toute connaissance de cause.

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Commentaires

1. Le mardi 27 novembre 2007, 19:29 par Eric

C'est bien qu'EES ait réussi à faire passer des idées assez complexes à la tv.
Et il est vrai qu'en comparant le monde de la culture à celui de la politique on tombe de haut. Certes les hommes politiques manient des idées complexes, mais ils les simplifient, ils rétrécissent tout, surtout quand ils disent "les léecteurs ne peuvent pas comprendre"...

2. Le mardi 27 novembre 2007, 19:54 par Cedric Augustin

@Eric : les propos de Eric-Emmanuel Schmitt ne sont que dans le cadre en gris. J'ai effectivement apprécié l'accessibilité de ses propos mais heureusement que j'ai pu les réécouter sur le site de France Inter pour ne pas les travestir, car il a une densité d'information par phrase qui mérite une attention bien plus approfondi que dans d'autres émissions.

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