Gestion de l'incompétence

Je reprend un de mes commentaire fait à la suite d'un billet de Frédéric ''Appuyer sur ce qui tient'' pour poursuivre et construire ma réflexion.

En effet, de ma petite expérience, professionnel, citoyenne ou militante, il me semble que le premier problème dans bon nombre d'organisation humaine est la non gestion de l'incompétence.

Gérer une donnée inquantifiable

Par gestion j'entends le long terme. En effet il est courant de mettre en place des procédures pour améliorer une organisation. Bâtir un projet ou un programme qui s'appuie sur des objectifs à atteindre. La tache consiste ensuite à mettre en branle l'organisation avec ces procédures.

La première des erreur consiste à croire qu'une procédure bien faite sera suivie. Cet apriori fait fi de la nature humaine. Les organisations qui fonctionnent bien ne partent pas du principe qu'une fois qu'une procédure est mise en place elle est respectée. C'est la gestion des conséquences de la non application de la procédure qui est la partie la plus importante dans la procédure. Il est donc nécessaire de prévoir les redondances, les voies de secours.

En revanche intégrer dans les processus l'incompétence comme n'importe quelles autres contrainte est la chose la plus difficile à faire accepter, à vendre, à budgétiser, à programmer. Cela nécessite de vraies ressources, tant humaines que financières, et pas mal de compétence.

Tous des incompétents

Et pourtant, nous sommes tous incompétent à quelque chose dans nos missions ou notre vie. La culture élitiste qui prévaut aujourd'hui rend tabou le fait de laisser une place acceptée à l'erreur, à l'inadéquation, à la mauvaise volonté, à la paresse, au jemefoutisme, à l'incapacité à faire, au mensonge. On leur fait la chasse en se leurrant sur le fait que l'on peut les éradiquer.

Quelle entreprise est capable aujourd'hui d'intégrer dans ses process des pourcentages d'incompétence ?

Après on s'étonne

Nous ne sommes pas compétents et nous voudrions que les autres le soit. Nous refusons aux fonctionnaire du service public que l'on sollicite, ou au commerçant chez qui l'on dépense son argent, ou à l'artisan qui intervient chez nous, ce que nous faisons nous même. Quel est donc ce phénomène qui nous rend si intransigeant à l'égard d'autrui ?

Les chinois ont intégré l'erreur comme normale à des niveaux beaucoup plus haut que les occidentaux afin de réduire les coûts de production. Lorsque vous acheter un article dans un magasin, le vendeur le test devant vous, actant du fait qu'il est normal que le produit soit défectueux. Vous avez droit de ramener le même article acheté dans un magasin français, mais le vendeur vous fera des yeux énormes si vous voulez le tester avant de l'emporter.

Des processus redondants, des protections

La crise que nous vivons en ce moment montre que nos systèmes de protection sociale, aussi peut performant économiquement parlant ou décriés par les tenant de l'efficacité budgétaire, se sont révélés être un improbable avantage. Dans un monde libéral idéal ils devraient être inutiles. Sauf qu'aujourd'hui, la France continue à consommer dans la tourmente.

Conclusion

Demain, c'est notre capacité à intégrer l'erreur et l'incompétence comme donnée normale de tous nos processus qui va définir notre place dans la société mais aussi dans l'économie.

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Commentaires

1. Le jeudi 18 février 2010, 04:08 par florent

C'est très intéressant. Peut-on rapprocher cela de la conception humaniste ? Selon laquelle on appréhende l'Homme dans sa complexité, sa richesse, donc y compris son imperfection... et tout ce que cela implique par la suite (les répercussions sont très nombreuses en termes de projet de société, bien plus qu'on ne l'imagine au premier abord... ce billet pourrait en être une illustration).

2. Le jeudi 18 février 2010, 08:35 par falconhill

Il est excellent ce billet !

3. Le jeudi 18 février 2010, 23:19 par AS

je pense que c'est le moment de relire "le principe de Peter" très drôle mais tellement vrai.
Il y a tous les développements sur l'incompétence.... aboutissement obligé de chacun, particulièrement au niveau professionnel.

Comme il y a des statistiques sur tout il doit être relativement facile de "chiffrer" l'incompétence et d'en tenir compte mais je pense que l'on s'y refuse, prévoir le pourcentage ou la capacité d'erreurs de l'autre c'est reconnaître la même capacité ou incapicité en soi-même.

4. Le vendredi 19 février 2010, 00:42 par Cedric Augustin

Le principe de Peter est une une constatation d'une réalité (http://fr.wikipedia.org/wiki/Princi...) mais en rien un une approche de gestion. Il est vrai qu'en tenir compte est déjà un pas vers la gestion de l'incompétence ;)

5. Le vendredi 19 février 2010, 10:39 par AS

Merci pour le lien avec wikipédia - je suis incompétente dans ce domaine -
pour la réflexion je pense que cela nous renvoie aux comportements actuels :
la volonté d'égalitarisme - entre autre le collège unique - tous les enfants ont le même enseignement, idée brillante pour l'égalité sauf ... qu'elle génère l'inégalité en ne tenant pas compte des différences, des lenteurs des décalages de culture et au lieu de rattraper elle enfonce un peu plus l'enfant ou l'adolescent.
Je pense qu'un bon management d'entreprise tient compte de l'incompétence, pas forcément d'une façon codifiée, organisée mais dans la pratique, dans les relations journalières.

Toute systématisation d'un mode de fonctionnement me parâit dangereause.

6. Le vendredi 19 février 2010, 10:50 par JG

Ce phénomène est assez connu des gens qui font de la qualité. Il existe la notion de COQ pour "coût d'obtention de la qualité".
Ce coût est estimé généralement entre 20 et 40% de la valeur ajoutée totale d'une entreprise moyenne ce qui est colossal.
Néanmoins, les managers sont généralement peu sensibles à cette notion car ils préfèrent s'occuper de développement commercial ou techniques.

7. Le vendredi 19 février 2010, 12:29 par Cedric Augustin

@florent : en effet l'idée d'humanisme consistant à mettre l'humain et donc ses imperfections, au cœur d'un projet, on peut faire le lien.

@ AS : on en a déjà parlé par ailleurs, les bon managers ont intuitivement le sens de la "ressource humaine" et ne se contente pas de l'approche "comptable et financière".

@JG : merci pour ces informations.

8. Le dimanche 21 février 2010, 10:35 par Cyril Cousinié

Bonjour Cédric,

Tu peux partir du principe que tu es totalement incompétent en orthographe, et que tu ne fais pas un billet sans faute. Par exemple tu oublies des "s" un peu partout :D

Ainsi en gérant systématiquement cette incompétence, tu peux d'abord rédiger ton article dans Word (si tu l'as) et utiliser le correcteur orthographique.

Bon, pour ma part, sans aller dans Word je me contenterai d'une relecture de ce commentaire, par soucis d'équité, et en espérant ne pas me faire prendre à mon propre jeu !

A +

9. Le dimanche 21 février 2010, 12:59 par Cedric Augustin

@Cyril, mon incompétence en orthographe/grammaire est de notoriété publique. Par contre le souligner sans m'envoyer un petit email avec les corrections ne sert strictement à rien.

Pour information, chercher et corriger des fautes dans les textes que je publie multiplie par 2 mon temps de production d'un texte. Quant on est incompétent, cela n'est pas forcément aussi simple que tu le décris. Donc le temps n'étant pas élastique, je fais des choix. En plus, parler de Word à un libriste est un peu une insulte ;)

10. Le dimanche 21 février 2010, 20:00 par Cyril Cousinié

Je taquine ;-)

On se voit jeudi ?

A +

11. Le lundi 22 février 2010, 10:06 par nicolas

vous faites pas de campagne pour les élections régionales Monsieur Cédric Augustin

12. Le mardi 23 octobre 2012, 07:16 par FrédéricLN

Merci (très très tardivement) pour ce lien ! et bravo pour cette réflexion tout à fait stimulante.

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