Le mot diversité peut avoir de nombreuses significations, mais ici il fait écho au mot ségrégation et minorité. On en entend souvent parler dans les média, mais pas forcément de la meilleure façon.
Ce n'est pas la première fois que j'aborde ce sujet sur ce blog, puisqu'en janvier 2007, déjà un billet portait le titre de Diversité. La question est toujours la même : pour mesurer une discrimination il faut des outils. La question est donc bien de savoir avec quels outils on mesure la discrimination.
Lors du conseil départemental du Mouvement Démocrate 06 qui s'est tenu il y a 2 jours, Mustapha DALI[1] a interpellé la présidence sur "l'absence de diversité" qui caractérisait le futur bureau du MoDem06. Si tout le monde a reconnu qu'il eut sûrement été possible de faire plus dans le sens de la "diversité", avec un aimable consensus unanime, aucune solution n'a pu être proposée, et pour cause.
Comment choisir quelqu'un représentant la diversité ?
Pour la parité il est facile de se référer à l'identité d'une personne et donc de connaitre son genre[2]. Même comme cela, alors que ce devrait être facile, un homme, une femme, on dépense une énergie folle pour l'appliquer. Même chose pour l'âge, l'information est disponible et la démarche est assez naturelle lorsque l'on fait attention, encore faut-il disposer d'un panel de militants représentatif.
Mais pour le reste, on y met quoi dans cette fameuse diversité ?
- La couleur de peau. Ça devrait être facile, il suffit de regarder. Si bien bien sûr on connait la personne.
- La religion.
- L'origine géographique. Il faudra définir si l'on parle de pays, de région, de circonscription ou de quartier.
- L'origine géographique des parents, voir des grands parents que l'on identifiera par la consonance du nom ou du prénom par exemple.
- Le handicap. Tous les handicaps sont-ils éligibles ou seulement ceux qui se voient ?
- L'orientation sexuelle.
- ...
Bien sûr tous ces critères sont rigoureusement interdit dans un fichier d'adhérents, et leur utilisation en contradiction totale avec les principes de notre république française. Les utiliser comme critère suppose d'en avoir connaissance et pour respecter l'égalité, de les connaitre pour tous, ce qui est totalement irréaliste.
On se rappelle d'Azouz Begag, qui se qualifiait "d'arabe de service du gouvernement"[3] dans les média ou dans son livre Un mouton dans la baignoire. Choisi-t-on quelqu'un, non pas pour ses qualités, mais pour "l'image" qu'il représente ?
On fait comment alors ?
Discrimination positive
A ce stade de la réflexion il ne reste que la discrimination positive[4] comme réponse. Elle est interdite en France, contrairement aux USA, où elle a permis à une société ultra ségrégationniste de changer en quelques décennies. C'est un choix de société[5] qui ne peut pas se prendre au niveau d'une simple organisation comme le MoDem06. En effet la discrimination positive étant illégale, sa mise en oeuvre ne pourrait être que "discrète" pour ne pas alerter les autorités. Ce qui se fait dans une équipe de 50 personnes pose un réel problème lorsqu'il faut l'étendre à un parti politique local avec près de 1200 membres. D'autant plus lorsque ce parti prône la sincérité comme mode de gouvernance.
Et puis imaginons une minute les réactions de certains écartés "pour la diversité". L'aimable consensus sur la nécessité de la diversité ne tiendrait pas le temps de le formuler. On travaille avec des égos dans un parti politique, ne l'oublions pas.
Une demi solution
Quand on parle de visibilité des minorités, autre aspect de la "diversité", il intervient un autre paramètre, c'est le comportement des "recruteurs"[6] à qui l'on peut demander de fonder leur critère de recrutement uniquement sur les compétences et les affinités[7] en faisant abstraction des autres critères.
Le problème pour un parti politique est le niveau d'engagement des "minorités" qui est par essence "minoritaire", si tant est qu'il existe. Choisir selon le critère de compétences suppose de disposer des compétences, qui pour le coup n'ont rien à voir avec la diversité. Il suffit de penser statistique pour voir que pour une minorité qui représente 10% de la population[8], il est 9 fois plus probable de trouver une compétence dans les autres 90%. Ce qui suppose que pour rendre "visible" une minorité, si tant est que l'on puisse choisir selon un critère illégal, il faut la sur-représenter dans un collège de 26 personnes[9].
De mon point de vue, la priorité est donc au niveau du recrutement des adhérents et militants. Dans le cadre de toute élection, et je l'ai vécu dans l'équipe de Loïc Dombreval, l'objectif était d'être représentatif des adhérents. Le plus simple aura été géographiquement. Demain ce pourrait être selon les centres d'intérêts et des thématiques. En faisant entrer des militants avec d'autres priorités et d'autres expériences, c'est le changement de la physionomie du collège électoral qui conduira dans une élection à la proportionnelle au changement de la composition du conseil départemental et donc de son exécutif qu'est le bureau.
Je reconnais que c'est une bien piètre solution. Mais tant que l'on ne sera pas submergé par le nombre pour composer des équipes, choisir des gens sur ce qu'ils représentent au lieu de ce qu'ils peuvent faire est et reste une erreur.
Notes
[1] Recteur de la mosquée de Cannes et militant très actif dans le milieu associatif.
[2] Il y a bien sûr les trans-sexuel qui subissent aussi des discriminations pour lesquel(le)s le genre est justement la question. Mais bon, pour le propos de ce billet je vais faire l'impasse, j'en ai déjà parlé et j'y reviendrai.
[3] Ou aussi d'Arabe de sévice.
[4] Je hais ce terme mais il est hélas explicite.
[5] Choisir dans le modèle de société la discrimination positive est la chose qui me révulse le plus, et personne n'a réussi à me convaincre que cette solution pourait être bénéfique à mon pays.
[6] Le terme est inapproprié dans le cas d'un parti politique, bien qu'il y ai "recrutement" de compétence dans la constitution des équipes.
[7] Oui, on ne le dit pas souvent, mais il faut tout de même avoir quelques atomes crochus avec quelqu'un pour travailler avec.
[8] C'est une TRES grosse minorité 10%.
[9] 26 est le nombre de personnes au bureau exécutif du MoDem06.